Curaçao – Cabo de la vela (ancien post oct 2012)

Nous voilà prêts au départ pour une longue traversée en direction de la Colombie. Cette navigation est l’une des plus délicates de la Caraïbe, car il faut passer par le Cabo de la Vela surnommé le Cap Horne des Antilles… A cet endroit les montagnes de la cordillère des Andes sont au bord de la mer. Le vent est donc compressé par ces montagnes et subit une forte accélération… Il en résulte du gros vent et du coup de la houle… Nous avons beaucoup lu à ce sujet et différentes options sont envisageables : au large avec une grosse houle et moins de vent ; près des côtes avec moins de houle, mais plus de vent …

Après réflexions et consultation de la météo, nous optons pour l’option 2 qui permet également de faire des pauses le long de la côté colombienne… Notamment au niveau du fameux Cabo de La Vela qui se trouve être un spot de kite très venté…

Lors de notre séjour à Curaçao, nous avons rencontré Mathieu, Céline sur leur bateau Shenasa. Ils ne sont pas tout à fait prêts au départ quand nous leur annonçons : il y a une bonne fenêtre météo, on part demain ! Si cela vous tente, on y va ensemble ! En effet, après une longue période de calme depuis quelque temps (nous avions fait beaucoup de moteurs pour arriver jusqu’ici…) le vent se lève à nouveau et en partant vite, nous devrions éviter d’avoir trop de houle.

Nous décidons de partir dans la nuit afin d’arriver au cabo de la vela le surlendemain dans l’après midi . Le moteur est allumé à 23h15 et nous suivons Shenasa dans le tout petit chenal de sortie de Curaçao. Nous longeons la côte, lorsque nous apercevons, ou plutôt lorsque nous entendons, le moteur d’un bateau à moteur qui se rapproche…. Tout feux éteint, il s’agit des douanes… Ils se rapprochent de plus en plus prêts…. Décidément, nous attirons les bateaux des douaniers… Ne correspondant pas au bateau peut être recherché, le bateau s’éloigne à nouveau, et nous pouvons hisser les voiles vers 1h00 du mat. La navigation débute.

Au loin, nous voyons des éclairs illuminés le ciel, mais …nous allons dans leur direction… Pas moyen d’éviter cet orage… Se rapprochant de plus en plus, nous comptons le temps écoulé entre l’éclair et le coup de tonnerre : 20, 15, 10 puis 5 secondes… houlala ça promet cette nav !!! Shenasa apparaît au loin, à l’horizon, tel une ombre chinoise illuminée par les éclairs…. Ce sont des moments très impressionnants. La tension monte à bord : si un éclair nous foudroie, c’est toute l’électronique, et les équipements électriques qui seraient grillés. Ceci signifierait donc: plus de pilote automatique, de GPS, de vitesse, d’anémomètre, de frigo, de lumières … bref plus rien… Nous décidons donc de déconnecter les batteries, il est 3h20 du mat.  De son côté Shenasa a également tout éteint à bord, nous n’aurons plus de contact radio pendant un long moment…Comme nous n’avons plus de pilote, je suis à la barre…. Au bout d’une bonne heure, une petite pluie s’installe, les éclairs sont loin, et nous pouvons à nouveau connecter les batteries ainsi que les instruments….. C’est plus rassurant!!!! Le temps se calme enfin vers 5h30 du matin…. Quelle nuit électrique !!!!

Au petit matin, nous cherchons nos amis, mais nous ne les apercevons pas  à l’horizon… Nous faisons des appels à la VHF….. Sans réponse… On espère qu’il ne leur ai rien arrivé, qu’ils n’ont pas été frappé par la foudre surtout…. On tire un bord vers bâbord pour tenter de se rapprocher de leur hypothétique position… Nous finissons enfin, par nous retrouver vers midi !  La journée se passe tranquillement et nous finissons même par pêcher… Une dorade coryphène et un thon, tout ça d’un coup. Coraline se lance dans la découpe des bêtes. C’est une première! D’habitude c’est le boulot du pêcheur cuistot. Elle s’en tire à merveille ! Et nous nous régalons avec de bons sushis !!!

En fin d’après midi, nous découvrons Birdy un petit oiseau perdu, qui s’agrippe comme il le peut à la baume.  Logé dans un creux de la voile, il est tout recroquevillé… Nous n’avons aucune idée du moment où Birdy a rejoint le bateau, mais ce qui est sûr, c’est que nous sommes maintenant trop loin des côtes pour qu’il puisse y retourner sain et sauf…. Les marins disent que ces passagers clandestins ont peu d’espoir de vie dans de telle situation, il faut donc essayer de les capturer et de les enfermer dans une boite à chaussure pour ne pas les affoler. qui passera la nuit sur le pont.  Malgré plusieurs tentatives, Cora n’arrivera pas à le capturer: Birdy s’envole à chaque fois et revient se loger au même endroit… A ce jour, nous ne savons pas ce qu’est devenu le petit Birdy….

Dans la nuit, nous devons traverser les Monjes, ce sont 3 petites Iles qui dépendent du Venezuela. Il n’y a pas d’habitant, juste une base militaire. Juste en arrivant à hauteur de ces iles, pas de chance…. Le vent tombe subitement et un gros orage approche. Presque à l’arrêt, impuissants, nous n’avons rien d’autre à faire que de le voir se rapprocher de très très loin… Puis de très loin….. Enfin de loin….  maintenant de plus près…… Et finalement de se retrouver dedans… Les éclairs tombent à nouveau autour du bateau … Cette fois-ci, on compte même jusqu’à 2…Mais n’ayant toujours pas de vent, nous sommes cette fois-ci quasiment à l’arrêt, les batteries coupées à nouveau, sans instrument. Encore une super soirée en perspective quoi!… Nous avons de la chance la lune est pleine et nous pouvons discerner au loin les îles des Monjes…. Parce que maintenant que nous voguons à tâtons, sans instrument, il ne nous manquerait plus que de s’échouer sur une de ces îles…. Heureusement que ma tablette est là avec son GPS intégré. Nous ne perdons pas le cap. Au dessus de nos têtes, de gros cumulonimbus bien noirs…. Ils semblent se mette à « couler » comme si une partie du nuage tombait vers la mer. Je ressens des courants d’air chauds puis glacials autour de moi… Étrange sensation dans la nuit où tous les sens sont en alertes. Nous avions entendu parler de ce phénomène dans une de ces fameuses histoires de pontons: lorsque le nuage touche la mer, il pourrait y avoir une petite tornade qui se forme… Ne sachant pas s’il s’agissait d’une légende marine ou d’un fait réel, nous préférons risquer de remettre les batteries, pour démarrer le moteur et s’éloigner de cette zone sans vent et un peu inquiétante tel le triangle des bermude… Au bout d’une heure, nous sommes sauvés, le vent se lève, nous remettons les voiles et surtout nous sommes loin de cette zone paniquante. Le génois est tangonné, nous filons à 6 nœuds !!! Le Black Pearl lancé à vive allure file pendant toute la nuit.

Au petit matin, la côte colombienne dessine de superbes paysages : de larges plages de sable, des grosses montagnes verdoyantes et aucune trace de civilisation.  Nous approchons du Cabo de La Vela, toujours à 6 nœuds côte à côte avec nos amis de Shenas … La tension monte….. Nous allons passer le Cap horn de la Caraibe….. A quel moment va t on être maltraités par d’énormes vagues et ce vent violent? Nous sommes à l’affût, prêts à riposter contre les éléments……

 

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