Rappelez vous! Nous vous avions simplement dit que les derniers jours avaient été éprouvants… voici les détails de la fin de la traversée!!!!
22ieme jour de traversée: Il ne nous reste que 400miles à parcourir…. Soit J-3 ou J-4 avant l’arrivée…. Quand en relevant les gribs, nous nous apercevons que la dépression au Sud-Ouest va nous donner du fil à retordre… Le moral chute, surtout celui de Laurent qui était convaincu de poser pied à terre dans peu de temps….
Lolo: j’ai le moral dans les chaussettes!
23ième jour: Dans la nuit, le vent s’est levé à nouveau, la houle croisée a pris le bateau en sandwich… Autant vous dire, que nous avons passé une très mauvaise nuit inconfortable…. Au réveil, nous avons, et la houle, et le vent, dans le nez….Notre cap devrait être au 240°, malheureusement nous tirons un bord au 190° puis un au 308°… malgré une bonne vitesse de 5 noeuds, la distance relative par rapport au point d’arrivée est faible. En effet, à la fin de la journée, nous n’avons parcouru qu’une trentaine de miles…. (plus que 310 miles en ligne directe)
Cora: C’est bizarre mais ça m’amuse de voir Lolo énervé… Depuis qu’il a rejoint mon club « y’en a vraiment marre », je me sens moins seule. J’ai même le sourire au lèvre.. Maintenant que nous en sommes au 23ieme jour, une semaine de plus ou de moins, ce n’est plus la mer à boire… Je prépare donc, avec douceur, mon Lolo à la « terrible » conclusion: « Il vaut mieux se préparer psychologiquement à passer une semaine supplémentaire et être heureux si nous arrivons avant…. »Mais lui, il ne l’entend pas de cette manière…Il n’en peut plus… il tourne en rond… Il maudit les conditions climatiques… Il essaye de retourner le problème dans tous les sens…. Comme d’habitude trop optimiste, il n’arrive pas à accepter les aléas de la météo…. Il ne peut concevoir de ne pas aller dans la direction voulue….Malheureusement, il a beau faire tous les réglages inimaginables, rien n’y fait..hihihi… Mieux vaut regarder un bon film dans la cabine arrière….
Lolo: Après une semaine de nave, Cora s’ennuyait déjà et trouvait le temps longs. Il aura fallu que j’en ai marre à mon tour, pour qu’elle retrouve le sourire ! ! ! ça c’est le comble tout de même. Moi j’ai des raisons aujourd’hui d’en avoir marre: Nous sommes malmenés par les éléments, nous n’allons plus dans la bonne direction, ce qui implique au moins 3-4 jours de plus que prévu…Elle qui s’ennuyait par beau temps, est joyeuse par mauvais temps… y’a un truc que je ne pige pas là!
24ieme jour: un peu de répit… la journée est calme, le vent est complètement tombé. Nous mettons donc le moteur et reprenons le bon cap… Etrange, non???…. Le proverbe ne dirait-il pas : le calme avant la tempête??? (plus que 210 miles juqu’à l’arrivée)
25ième jour: Encore une nuit mouvementée: A partir de 1H du matin, le vent monte à 25kt et change encore d’orientation (Sud-Ouest). Le courant et le vent dans le nez, le Black Pearl n’avance pas!!!! Nous devons mettre le cap au 160°…. Soit au Sud-Est… C’est démoralisant, nous nous éloignons complètement du point d’arrivée…. Pendant toute la journée, le vent est fort….la mer est agitée et nous inquiets….Le baromètre est descendu à une pression de 1012 bar alors que nous étions encore à 1018 il y a 4 jours…..Vers 14h nous changeons de bord au 310°…. Le vent monte d’un coup,sans oublier cette grosse houle qui nous maltraite toujours… Comme toujours, les bruits qui résonnent à l’intérieur du bateau, sont angoissants…. On accuse de la fatigue et du stress…. On essaye d’oublier en regardant la trilogie du Parrain, blottis dans la cabine arrière… Mais au fond, on a peur… Peur de casser quelques choses à quelques jours de la fin…. L’anémomètre ne cesse de nous affoler…. (Il faut dire que nous n’avons jamais navigué par gros temps…) N’avançant pas par rapport à l’arrivée, et les conditions n’étant pas agréables, la décision s’impose, nous stabilisons le bateau à la cape….Il dérive ainsi lentement sous le vent en décrivant un mouvement oscillant d’avant arrière. Nous privilégions ainsi le confort pour nous reposer un peu quelques heures… Nous changeons alors de nouveau de bord, cap au 140°…. C’est la déprime: nous faisons des bords carrés!!!!!En d’autres termes, ça veut dire qu’on n’avance pas du tout: quelque soit le bord choisi, lorsqu’on change de bord on revient presque sur nos pas….Puis d’un coup, un fort grain nous tombe dessus… En moins de deux, nous voilà par 35 noeuds de vent…
Lolo : Nous avons passé la journée à ne pas avancer, mais vraiment pas….C’était déjà déprimant!!!! Mais voilà que ce satané grain nous oblige carrément à faire marche arrière !!! Terrible sensation car avec cette force de vent, le bateau file trop vite. En moins d’une heure nous sommes revenus à peu près à notre position de la veille !! Il n’y a rien de pire pour m’exaspérer grrrrrrrr!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Il faut aussitôt prendre la barre, pour soulager le pilote et se mettre en vent arrière, afin d’éviter de casser quelque chose…
Cora: Je serre la barre de toutes mes forces… mais j’ai du mal à la tenir. Les forces sur le safran sont trop importantes…Au fond de moi, je prie pour que rien ne casse… C’est toujours ma hantise…. On a heureusement réduit toute notre voilure au maximum…j’ai peur… Je suis morte de peur, à vrai dire… Et morte de froid, en plus… Il pleut, il vente, des paquets de vagues se jettent dans le cockpit…. Mais quand est ce que ça finira tout ça????
Changement de quart… Laurent prend la relève et a le droit au même scénario que Cora….
Lolo : J’en avais déjà marre lorsque j’étais encore bien au chaud à l’intérieur… Mais là, de me retrouver dehors, à prendre la pluie, les vagues… dans un vent soutenu, c’est pas la joie !!! Cora me regarde anxieusement dans la descente puis retourne à ses activités sur sa Nintendo DS, histoire de ne penser à rien…. je tiens la barre fermement, et ça tape de partout.. Mais pourquoi on est là ? J’ai trop envie de me retrouver au calme dans un mouillage peinard car là ce sont les pires conditions que je n’ai jamais eues…. Je me demande comment certains navigateur font pour aller dans les 40ième rugissant où c’est largement pire !!! Une chose est certaine le gros temps je n’aime pas ca !!! Je sens le bateau hyper tendu, il vibre… La coque est solide, le gréement aussi mais quand même, qu’est ce que ça encaisse comme choc!!!!…
Autant vous dire qu’on n’a pas beaucoup fermé l’œil de la nuit… (Plus que 220 miles jusqu’à l’arrivé).
26ième jour: Le vent passe sud et se calme entre 6 et 12 nœuds…. Serait-ce encore un « calme avant la tempête???? » On essaye d’optimiser les réglages de voile pour gagner du terrain… En effet, l’orientation du vent, nous permet de reprendre un cap plein ouest….Ouffff nous repartons dans la bonne direction….Aujourd’hui, c’est repos, il faut se remettre de notre nuit éprouvante, car l’expérience nous a prouvé qu’une nuit agitée peut en cacher une autre…..( encore 130 miles)
27ieme jour: Encore une bonne centaine de miles en ligne directe….Au vu des prévisions pour les deux prochains jours, nous choisissons de partir au Sud-Ouest, car le vent est tout d’abord orienté Nord-Ouest et devrait ensuite passer Sud- ouest pour les derniers miles…..Trop fort, (entre 20 et 25 nœuds) le moteur est peu envisageable avec une houle bien formée de 2 à 3 mètres…Comme d’habitude, la « tempête » arrive rarement de jour… C’est donc à la tombée de la nuit que le vent se lève….Les bruits sourds du vent s’engouffrant dans les voiles, les vagues frappant de plein fouet la coque du bateau, tout vibre, il nous est impossible de trouver le sommeil… Les mauvais souvenirs de l’avant dernière nuit remontent à la surface, et nous paniquent un peu….Le pire est de penser que nous ne sommes pas au bout de nos peines, car plus nous nous rapprochons des Gambiers, plus nous gagnons le cœur de la dépression…. On se maudit d’avoir pris la direction des Gambier et non des Marquises… (plus qu’une cinquantaine de miles)
Lolo : Là c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase… J’en peu plus d’être malmené et d’être impuissant face aux éléments. Le bateau a le moins de toile possible mais ça continue de taper surtout quand le vent monte fort dans les rafales…. Heureusement pour nous, le pilote tient bien la barre sans peiner, nous pouvons donc rester à l’intérieur en attendant que ça passe. Il y a beaucoup de bruit, le bateau grince, les vagues tapent violemment, certaines passent au dessus du pont… On entend l’eau qui ruisselle, le vent dans le mat… brrr c’est stressant et flippant. Vivement que ça s’arrête…
Cora: on m’avait vendu une traversée super tranquille, en vent arrière…Un alizé bien établi… Juste ce qu’il fallait pour avancer agréablement…. Quelle publicité mensongère… « si j’avais su j’serais pas v’nue »….. Finalement je préférais m’ennuyer que mourir de peur….On a beau se répéter: « tu verras dans quelques mois, on en rigolera….. » et bien croyez moi, que sur le moment c’est trop flippant!!!!
28ieme jour: le vent ne se calme pas, bien au contraire… plus nous descendons au sud, plus la pression chute…et plus le vent augmente…. 29, 30, puis 31 nœuds….. On est inquiet…. Au petit matin, le ciel est menaçant…. Il pleut…. La houle se forme encore plus… Par 3 à 4 mètres de creux, le Black Pearl se fraye difficilement un chemin….des paquets de vagues passent par dessus le cockpit… Laurent à la barre, est trempé…Nous décidons à nouveau de prendre un peu de répit en se mettant à la cape….Puis nous repartons….Nous perdons un bar de pression, toutes les 15 minutes, et gagnons aussitôt 1 nœud de vent…. Lorsque nous passons les 35 nœuds, une chose est clair, nous fonçons droit sur le cœur de la dépression…. Si nous voulons éviter de tout casser, il faut s’éloigner…. A tribord toute!!!!! …Il ne nous reste qu’une toute petite trentaine de miles à parcourir (en ligne directe)….. Mais voilà les Gambier sont à notre Nord Ouest et nous remontons presque plein nord. Croyez nous, c’est rageant comme situation….Heureusement au fur et à mesure que nous nous éloignons du cœur de la dépression, le baromètre remonte à vu d’œil et le vent se calme …. Plus que 30, 28, 29, 27, 26…..20…..15 nœuds….. Ouffffffffffffff…. La mer se calme, elle aussi…
Nous apercevons la côte……C’est beau… Déjà, le bonheur d’arriver efface petit à petit les désagréments des derniers jours….
Le ciel s’éclaircit à nouveau…. On enlève la veste de quart et on se découvre doucement…. On y est presque….
Le jour est bien avancé, et nous savons qu’il n’est pas prudent de rentrer dans un archipel si les conditions ne s’y prêtent pas…. Mais nous sommes tellement épuisés que nous n’avons aucune envie et surtout aucune énergie pour passer une nuit supplémentaire, à l’extérieur de la barrière, à faire des ronds dans l’eau….Nous poussons le moteur, il faut à tout prix mettre l’ancre avant le coucher du soleil….
En approche de la passe Sud-Est, les fonds remontent progressivement…. Cependant, le profondimètre indique toujours la valeur LAST….Ce qui signifie qu’il y a plus de 150m de fond (d’après l’instrument)… or en regardant les cartes marines, nous devrions déjà avoir 70m…. ET MERDE…. Le profondimètre nous jouerait-il à nouveau des tours???…. Le problème, c’est que cette fois-ci, il n’y a aucun bateau qui nous attend juste à la passe Sud-Est pour nous guider… Et Qu’il va faire nuit dans à peine une heure… Une vérification du câble…Il semblerait que ça remarche…..
Cora: Je n’ai absolument pas confiance dans le profondimètre quand Lolo me dit » c’est bon ça remarche… » Et effectivement, en plein dans la passe, où les lignes de fond annoncent entre 20 et 10 mètres, le profondimètre lui continue à annoncer des valeurs comme 60, 70mètres…… « Houston je crois que nous avons un sérieux problème!!!! »….. « Mais tu t’inquiètes pour rien, me répond Lolo, les cartes sont certainement fausses…. » » Ah je ne crois pas….. à moins d’avoir une visibilité de 50mètres, car là je vois les fonds…… »
Oupssss!!!!!!!! Grosse frayeur!!!!! Mais nous ne pouvons pas faire autrement…. il faut improviser un mouillage dans une baie nous paraissant sans danger….. Heureusement juste à côté de l’entrée Sud-Est, la baie de Akamaru semble proposer une bonne option….. Vite vite, ouvrons grand nos yeux, car il ne nous reste plus beaucoup de soleil….. nous repérons sur la carte, un mouillage dégagé et vérifions à vue qu’il n’y ait pas de patates de corail……Au coucher du soleil, nous mettons l’ancre par 14 mètres de fond (à priori)….
Grand soulagement, la tension retombe!!!! Nous l’avons fait!!!!!
Cora: Mais vous savez quel est le comble de l’histoire???? C’est que Laurent ose dire: » le mouillage n’est pas très calme quand même!!!!!!! » hihihi!!!! ça fait 28 jours qu’on se fait balloter d’un côté à l’autre du bateau, 3 nuits que nous avons à peine dormi… Alors une chose est sûre, c’est qu’on ne va pas faire les fines bouches, ça bouge certes, mais rien de comparable avec nos derniers jours de traversée!!!!!
Quelle aventure!!!!!