Nous avions prévu de passer quelques jours à Union, mais notre mésaventure d’hier, ainsi que le sentiment de s’être fait raqueter, nous pousse à hisser à nouveau les voiles vers de nouveaux horizons.
Nous filons donc vers Cariacou à Sandy Island, le « mouillage carte postale » de nos débuts. La traversée est courte: 2 heures au cours desquelles nous redoublons de vigilance. Au loin, j’aperçois 2 voiliers qui font la même route que nous. Nous sommes alors en plein vent arrière, à la voile, dans un vent de 14 noeuds. Les 2 voiliers sont des bateaux de location et avancent au moteur. Le « code de la route » en mer donne toujours la priorité au moins manœuvrant, donc dans notre cas, à celui qui est à la voile. Comme on nous a toujours dit de se méfier des bateaux de location, je ne détourne pas mon attention et check régulièrement leur position. Ils se rapprochent de plus en plus…. Après quelques minutes d’observation, je suis convaincu qu’ils nous foncent dessus. Nous sommes sur une route de collision comme on dit dans le jargon. Je n’ai qu’une très faible marge de manœuvre, car ma GV est complètement ouverte, et je dois éviter l’empannage brutal. Je ne vois personne à la barre, on dirait presque un bateau fantôme…. je ne me déroute toujours pas, mais me mets à hurler de toutes mes forces, en espérant être entendu à temps…. Car si les dommages du safran nous ont bien déprimé hier, un trou dans la coque, pourrait nous faire couler. Plus qu’à quelques mètres de nous, je hurle toujours de rage, une tête surgit alors du cockpit, et son visage est soudain pris de panique… Il vient de réaliser que la collision est éminente. Coraline qui préparait le déjeuner, sort également effrayée par mes hurlements et a à peine le temps d’apercevoir la masse gigantesque du bateau à quelques mètres de nous… A ce même moment, je donne un coup de barre pour nous écarter, car notre voisin n’a pas été assez réactif. La GV empanne alors brusquement. Heureusement, le vent n’étant pas trop fort, le brutal empannage ne laisse aucun séquelle. C’est passé, mais de justesse… Je m’énerve rarement, et surtout n’ai pas l’habitude de gueuler, mais là ça sort tout seul : Ectoplasme!!!! Moule à gaufre!!!! Marin d’eau douce !!!!!! Et tout autres mots agréables qui m’ont soulagé!!!! Dans le cockpit, nous n’avons aperçu que des jeunes. Nous supposons qu’ils ont mit le moteur, programmé le pilote automatique pour arriver sur Sandy Island et se sont reposés à l’arrière sans regarder ce qu’il pouvait y avoir autour!!!!!!… Belle frayeur… Maintenant nous comprenons parfaitement pourquoi les plaisanciers se plaignent souvent des bateaux de location. Ils peuvent être très dangereux.
Allant au même mouillage que nous, je ne vais pas me gêner pour leur dire leur 4 vérités!!! ça va me défouler !!! Ils nous prennent de haut, c’est à peine s’ils s’excusent. L’un d’eux a même le culot de me demander de parler en anglais alors que je m’évertue à rester calme et à parler posément dans la langue de Shakespeare.
Bref, depuis hier, c’est certain nous avons la chkoumoune!!! Et ça continue !!! Le temps de s’absenter faire la douane et de revenir, un vent fort s’est levé… Sur le net, ils annoncent une tempête tropicale qui tend à devenir le cyclone « Ernesto ». Cette nuit, il passe sur St Vincent/St Lucie !!!! Il ne nous manquait plus qu’un cyclone à présent… Comme si nous n’avions pas assez endommagé le bateau !!! Étant situés bien au sud de Saint Vincent, nous ne devrions pas avoir de vents dépassant les 35 noeuds… Mais on ne sait jamais comment peut se comporter un cyclone. Il peut toujours y avoir des changements entre les prévisions théoriques et la réalité. Par sécurité, nous mettons notre alarme de mouillage pour être certains que le bateau ne dérivera pas. Après une rapide concertation, Cora et moi, décidons de nous offrir une excellente séance de défoulement en kitant par 25 noeuds. Ce vent cyclonique est très puissant et excellent pour faire de très hauts sauts.
C’est parti ! Nous évacuons tous le stress accumulé ces dernières 24heures. Je balance des sauts énormes en criant » banzaiiiiiiii ». Les saut sont super aériens, j’ai l’impression de voler, tellement je reste en l’air. J’ai le temps de regarder les différents détails du paysage vu d’en haut, tout en continuant à crier. Nous sommes certainement sur-toilés, mais on s’éclate. Apaisés, nous rentrons à la tombée de la nuit. Nos voisins Tchèques nous ont invité à boire un verre. Nous passons une agréable soirée à déguster une spécialité locale, une sorte d’eau de vie à la pêche. Bien chargée en alcool, cette boisson tchèque!!! D’après les dernières informations météorologiques reçues par notre hôte, nous pouvons dormir sur nos deux oreilles, le cyclone n’est pas encore intense, et vu la distance qui nous en sépare, les vents ne seront pas trop violents pendant la nuit. Nous sommes rassurés.
Nous passerons les 3 prochains jours à ce mouillage car il pleut, il fait gris, et le vent est complètement tombé… C’est l’effet « après cyclone ». Grâce à une bonne connexion wifi, nous passerons donc notre temps à échanger avec vous 😉