En cette fin de Carnaval c’est comme si toute la fatigue accumulée pendant ces jours nous tombaient d’un seul coup dessus. On s’endort donc très vite mardi soir et le réveil est un peu tardif mercredi. Comme le veux la coutume Trini, mercredi c’est plage: facile de comater sur la plage! Halila, le pauvre, rentre à Londres ce soir, donc l’escale sur la plage de Maracas sera de courte durée, juste le temps de manger la spécialité locale : le burger bacon shark.
Vers 17h, on laisse Halila et on rentre tranquillement se préparer pour manger au restaurant avec des amis de Djibrilla. La soirée s’annonce assez courte car demain, la journée est plutôt chargée:
– avitaillement du Black Pearl, douanes, tour en avion (le même qu’on m’a promis!), puis départ de nuit pour Tobago.
Oui parce qu’une autre des coutumes trinis est de partir se reposer après le carnaval à Tobago où les plages sont magnifiques. La connexion aérienne comme maritime est fréquente et très peu onéreuse entre les deux îles. En 2008, nous avions loué une sacrée maison où nous nous étions bien reposés après un même carnaval éprouvant. Mais comme nous avons le Black Pearl, Djibrilla nous avait suggéré l’excellente idée de partir en bateau passer ces quelques jours sur l’île. Et nous avait il dit : « mais on a qu’à partir de nuit! c’est sympa de faire une nave de nuit tous ensemble ». Bien sur ayant déjà fait 2 naves nocturnes, nous avions trouver le projet alléchant.
Lors du diner nous aurions du avoir la puce à l’oreille lorsqu’en discutant avec ses amis Djibrilla est stupéfait d’entendre que la nave Trinidad Tobago dure au moins une dizaine d’heures, que le courant est très fort, et qu’il faut à tout prix longer de très près la côte trinidadienne jusqu’au bout avant de mettre le cap sur Tobago. « Ah bon ce n’est pas 5heures, demandera Djibrilla? ».
Mais ayant complètement confiance en Djibrilla, et ce parce que Gérard son papa, aurait déjà fait cette traversée sans aucun soucis, nous resterons fermement accrochés au projet d’un départ le lendemain à la tombée de la nuit.
Le mercredi tout le monde s’affaire: Laurent et moi à l’avitaillement pendant que Djibrilla et Mariela résolvent des questions administratives (pour rappel Djib et Mariela ont habité et donc travaillé à Trinidad pendant quelques temps). De notre côté, nous jouons la course contre la montre car à 14H00 nous devons tous nous retrouver chez JB pour rendre la voiture et partir à l’aéroport pour faire un tour. Je dois reconnaitre que de notre côté nous avons réussi notre mission dans le temps imparti. Mais lorsque nous avons pris le chemin de l’aéroport les choses se sont compliquées. Le gars auquel Djibrilla loue l’avion, n’a pas son assurance avec lui, et un malencontreux contrôle empêche l’avion de pouvoir décoller. Déçue, il faudra encore remettre ça à une prochaine fois….
Nous rendons donc la voiture, et passons dire au revoir à JB (notre hôte) sur son chantier (JB est le responsable de la construction d’un pont permettant d’alléger la circulation à la sortie de Port of Spain.) Il nous prête son chauffeur pour retourner au bateau, mais ce n’est pas n’importe quel chauffeur, c’est Dj Sleepy! Qui dit Dj dit, musiques de soca. Nous avons donc droit sur le chemin de nouveau à toutes les musiques que nous auront entendu des milliers de fois pendant le carnaval. En arrivant à pier 1, nous ne manqueront pas cependant de passer une clef USB à DJ sleepy pour récupérer l’intégralité des musiques car nous le savons, la soca c’est comme une drogue, une fois qu’on en a écouté à haute dose, il nous en faut pour le reste du temps.
Nous voilà donc tous les 4 sur le bateau, un peu plus tard que prévu, en train de préparer le départ. Même si nous sommes sous les tropiques, comme vous l’avez vu dans les précédents posts, une nave de nuit implique d’être bien équipé tout de même pour ne pas avoir froid. Avec Mariela, nous regardons donc dans nos affaires ce que nous pouvons prêter à nos deux invités étant donné qu’ils sont venus pour carnaval en oubliant notre nave de nuit. Les garçons préparent le bateau sur le pont.
Djibrilla me demande alors un cachet contre le mal de mer… Oui parce que même à quai, et en restant sur le pont il commence à se sentir moyennement bien!!! Ou lalala, il nous avait prévenu qu’il était sensible, mais bon là ça sent moyennement bon! Il faut savoir pourtant que Djibrilla a fait pas mal de bateaux avec Gérard et la famille mazin au grand complet, lorsque ceux-ci avaient un bateau et qu’ils parcouraient les antilles. On n’est donc pas complètement effrayé, et pensons que ce n’est qu’une précaution. On conseille donc à Mariela par la même occasion de prendre une petite pastille pour prévenir du mal.
La sortie de Pier 1 se fait beaucoup mieux que son entrée. Je dois même reconnaitre qu’elle se fait sans aucun soucis. Nous partons donc vers 19H30, le vent prévu est assez fort, mais nous avions oublié que la nuit serait bien obscure car la lune est pleine. Nous passons le canal sans aucun soucis et nous voilà embarqué en pleine mer. Laurent met cap à l’est afin de longer les côtes comme nous l’ont vivement conseillé les amis de Djibrilla. Mariela un peu grippée, nous abandonne et par se reposer dans la cabine arrière. Le vent étant dans le nez, nous restons au moteur en espérant avancer, Laurent nous donne les recommandations et descend également faire une sieste de courte durée. Nous démarrons donc Djibrilla et moi le premier quart. Enfin, Djibrilla ne prête qu’un oeil, en plus d’être fatigué par le Carnaval, il ne se sent franchement pas bien!!!! Le bateau tape, la houle est presque de face, et le courant encore plus fort que ce que nous imaginions. Nous avons entre 16 et 25 noeuds de vent de face , et nous n’avançons qu’à 3 noeuds au moteur alors que normalement nous devrions être à 6 noeuds. Laurent remonte alors et suggère de tirer des bords pour profiter du vent et voir si la distance parcourue est plus importante. Encore une à deux heures de gaspiller pour à peine quelques dizièmes de miles. C’est désespérant. Pour couronner le tout, Mariela remonte, blanche comme un cachet d’aspirine en nous faisant le fameux signe qu’on fait quand on veut vomir…. Nous sommes maintenant tous les 4 sur le pont, il fait froid, il pleuviote même. Djibrilla est en agonie, pendant que Mariela se concentre pour ne pas rendre à nouveau. Laurent toujours dans les réglages et la stratégie à adopter, moi à la barre. Laurent ne se sent pas vraiment bien non plus… On doit reconnaitre que partir de nuit juste après un carnaval n’est pas la meilleure idée que nous ayons eue… A 2H30, le capitaine suggère vivement un retour sur Port of Spain, cela fait maintenant 7 hrs que nous naviguons et nous n’avons pas du parcourir plus que 20 miles (pour infos 20 miles en conditions normales, je veux dire sans ce courant, et avec une force de vent semblable se font en environ 4 hrs) Djibrilla acquiesce complètement avec le capitaine, Mariela se concentre toujours pour ne pas rendre et est complètement hors conversation, et moi, j’ai la niak: ah non, on doit continuer… (j’ai du mal avec l’échec!) Sauf que là ce n’est pas un échec ça devient de la raison…. Il nous faudrait encore quelques 17H pour arriver à Tobago et ce dans des conditions abominables totalement inconfortables. Il faut le reconnaitre le capitaine prend la bonne décision, en mettant cap sur Port of Spain, donc en rebroussant chemin. Nos deux invités sont toujours en état de létargie aiguë tant ils ne se sentent vraiment pas bien! Je reste éveillée quelques 2hrs avant de sombrer dans les bras de Morphée. Laurent assure seul, notre retour dans des conditions toujours aussi mauvaises. La seule différence est que cette fois ci nous avons le courant et le vent avec nous et nous avançons donc à vitesse normale…
Au petit matin, il me réveille en disant: regarde les dauphins! Quelle arrivée dans la baie de Chaguaramas… Nous voyons deux bancs de dauphins qui passent très près du bateau. Un peu de douceur après cette nuit d’enfer…. Nos deux invités se rendorment et une heure plus tard nous voilà près à mouiller presque au point de départ. Nous avons choisi de mouiller dans la baie qui se situe en face de là où nous avons fait la soirée Insomnia il y a quelques jours. Nous attrapons une bouée (car nous n’avons plus envie de mouiller à Trinidad par 6m de fond depuis notre première arrivée).
Nous prenons un petit déjeuner bien mérité…. Nous avons tous une sale gueule, cette nave et surtout le fait de devoir rebrousser chemin, nous laisse un sentiment d’amertume. Mariela elle a la patate et à l’air plutôt heureuse malgré ses petits désagréments… Elle nous confie alors: « ben finalement ça valait bien le coup,, même si j’ai été malade, c’est super joli Tobago! »On se regarde tous les 3, on ne sait pas si on doit rire ou pleurer? elle blague ou elle est sérieuse?…. Finalement on en rigolera bien, bon peut être pas tout de suite, mais plus tard! surtout quand tous les gens que nous rencontrerons par la suite nous dirons: « mais trinidad tobago, jamais en bateau!!!!! Trop de courant!!! C’était sur que vous n’y arriverez pas!!! mieux vaut prendre l’avion: 50$ 30 min de vol!!!! »
Alors Gérard, si jamais tu as déjà fait cette nave comme Djibrilla nous l’a assuré, quel était le secret?!