De retour aux Tobago Cays, nous avons de la chance, le vent nous permet de faire une très bonne session de kite. Comparé à Février mars, il n’y a presque personne. Nous n’avons d’ailleurs vu aucun boys boat. Lorsque le vent s’est calmé, nous en avons profité pour plonger sur le tombant. Nous n’avions vu que les tortuesà notre premier passage. Le spectacle est magnifique, c’est la première fois que nous plongeons sur un tombant. Nous en avons presque une sensation de vertige, difficilement retranscrite par la vidéo:
Nous mettons ensuite les voiles vers l’île d’Union. En sortant des Tobago Cays, nous nous rappelons l’inquiétude que nous avions eu lors de notre entrée par la passe en mars dernier. Nous la regardons derrière nous, en nous disant: « maintenant nous sommes devenus plus aguerris, finalement cette passe est énorme et ne présente aucun danger, et surtout aucune difficulté! » C’est certain nous avons plus d’assurance! Pas que nous soyons moins vigilants, mais en tout cas, moins stressés!
Dès notre arrivée à Union, un boysboat se précipite pour nous offrir une bouée. Nous lui répondons que nous avons déjà mouillé ici, et que nous nous passerons de ses services… Nous savons que le mouillage dans le port est un peu compliqué à cause de la grande barrière située près de Palm Island. Mais comme nous l’avons déjà évoqué, nous nous sentons bien plus confiants aujourd’hui. Cependant, nous négligeons un léger petit détails….
J’allais charger notre précédente trace GPS, qui indiquait le chemin à suivre pour n’avoir aucun soucis… Mais finalement, je ne le fais pas et décide de me fier à l’arrière des bateaux. Focalisé sur la barrière de corail qui délimite l’espace de mouillage, je commence à faufiler le Black Pearl au cul des autres bateaux…. Nous avançons prudemment, comme à notre habitude. Le profondimètre annonce alors 10m. Mais, soudain, les fonds remontent rapidement: 8! 7! 6! puis 5! en moins de deux secondes nous voilà à 3m. Les fonds sont remontés anormalement! Oulala! Qu’est ce qu’il se passe? J’ai à peine le temps de dire à Coraline qui est au niveau de la GV que ce n’est pas normal, que nous sentons un choc!!! On a touché!!!! Le profondimètre annonce moins de 1.5m, or notre tirant d’eau fait 1.6m. (Le tirant d’eau, c’est notre hauteur entre la ligne de flottaison et le bas de la quille, soit plus clairement la profondeur maximale au delà de laquelle le bateau ne peut pas s’aventurer).
C’est pire que d’avoir simplement touché, nous voilà plantés sur une patate de corail. Il faut faire vite car la houle risque de nous y pousser plus encore. Plus nous trainerons pour nous sortir de là, plus le bateau sera endommagé… Je me souviens que dans « voiles et voiliers » (le magazine), ils conseillent de hisser à nouveau à la GV afin d’être porté par le vent. Ceci permet d’incliner légèrement le bateau, de minimiser les dommages sur la quille, la coque et le safran et surtout d’essayer de faciliter le décrochage de la patate. Coraline hisse la grande voile en 2 secondes, je donne des coup de gaz, mais rien ne se passe… On ne bouge pas… C’est même l’effet contraire puisque le vent nous repousse encore plus sur la patate….Nous sommes effrayés mais pour autant ne cédons pas à la panique….
C’est à ce même moment que le boys boat qui nous avait offert ses services, surgit du fond de la baie pour nous prêter mains fortes. Il faut dire qu’il y a plus d’un bateau qui, comme nous, se sont échoués sur cette patate…. C’est pourquoi, quand un bateau entre dans le port et se passe de leurs services, ils attendent patiemment, à l’affut d’un talonnage (le fait que la quille touche le fond comme nous l’avons fait!). Le boys boat dépose son copain (ils ont flairé les sous!) sur notre bateau. Celui-ci part à l’avant et lance un bout pour tracter notre bateau hors de la patate – il a un moteur de 40 chevaux… Mais dans la précipitation, il n’a pas vérifié que l’extrémité était bien accrochée. Le Boys boat fait vrombir son moteur et part à toute allure avec le bout, mais sans notre bateau…. Et merde!!!!!! Tu parles de professionnels! Bref Coraline renvoie un bout mais cette fois-ci accroché fermement à l’avant…. Puis elle et notre équipier improvisé baissent à nouveau la GV pour éviter maintenant de prendre le vent. Le boys boat s’est élancé à nouveau, et tire le bateau, pendant que moi je donne des coup d’accélération… On sent très bien le frottement du bas du Black Pearl sur le corail. ça nous fait presque mal…. Au moment où nous sommes presque sortis d’affaire, un autre « boys boat » arrive avec sa dinghy et son moteur de 15 cv, et pousse l’arrière du bateau pendant la fin de la rescousse…Autant vous dire, qu’il n’a pas servi à grand chose, puisque le gros du travail était déjà fait par son collègue.
Nous sommes sous le choc, presque tremblants, mais il faut vite reprendre ses esprits et mettre l’ancre. Et là, c’est une autre bataille qui débute, et pas des plus faciles…Nous allons parler « Money ».
Je demande au 1er boys boat « How much ? ». « As you want » me répond il. Nous avions discuté rapidement avec Cora de ce que nous pensions donner à nos dépanneurs…. Nous avions opté pour 150 EC soit 50 euros… L’autre boys boat arrivé sur la dinghy commence à parler de 1000 US$! What???!!!! C’est un scandale!!!!!! Cependant n’ayant négocié aucun prix avant notre dépannage, ces messieurs sont en droit de nous demander ce qu’ils veulent. Il faut savoir que pour un sauvetage en mer, on peut demander jusqu’à 10% de la valeur du bateau…. Nous commençons à prendre peur, car le deuxième nous réclame aussi son dû. Mais nous sommes surtout écœurés de la manière dont ils profitent de la situation. Finalement le premier est moins hargneux, il demande 1000$ EC, soit 300 euros…La négociation est tendue. Je réussis à ne lui donner « que 300 $ EC (soit 100 euros) » en spécifiant que c’est pour les deux… Il récupère son dû, mais n’est absolument pas d’accord à le partager. Bref, il nous laisse nous débrouiller avec le compère, tout en laissant entendre que nous ne sommes pas obligés de donner. Voilà tout le problème, donner au premier qui a fait tout le travail nous parait certes cher, mais tout à fait normal. Alors que nous nous sentons raquetter par le second. Celui-ci ne veut rien savoir, il veut exactement la même somme!!!! On tente de le virer … Rien à faire!!!… Il se montre alors un peu menaçant, on en a marre, nous sommes complètement abattus et capitulons pour 50€. Ce qui ne l’empêchera pas de partir en nous lançant un regard noir et en nous traitant de tous sortes de noms d’oiseaux…
Aussitôt tranquilles, je vérifie sur la tablette le signalement de cette patate située en plein milieu du port…Prêt à maudire la terre entière, pour mauvaise signalisation, je ne maudirai finalement que mon inattention puisque la patate est belle et bien indiquée sur les cartes… Voilà la preuve, qu’il ne faut jamais être trop sûrs de soi! Nous avons du mal à nous remettre de cette belle frayeur … Je m’en veux terriblement, mais Coraline me remonte le moral. Après tout c’est peut-être un avertissement pour ne plus relâcher notre vigilance.
Puis, vient le deuxième effet kiss cool: Bien que la quille ait rappé, les dommages ne peuvent être majeurs! En effet, celle-ci est en fonte, seul de la peinture peut avoir été arrachée. Mais quand est il de notre safran (le gouvernail)??? Étant à la hauteur de la quille, il doit probablement avoir touché, lui aussi. Beaucoup plus fragile puisqu’il est en fibre de verre et en bois, les dégâts pourraient nécessiter de grosses réparations. Une rapide plongée révèle qu’effectivement le bas de la quille a perdu son antifooling, -ce qui n’est pas très grave- par contre, le safran, lui, présente deux petits trous… Nous passerons toute la soirée à cogiter si, oui ou non, nous devrons sortir le bateau à Grenada pour reboucher les trous… En effet, si l’eau s’infiltre démesurément à l’intérieur, il pourrait complètement se déformer et ne plus servir. Dans le pire des cas, il pourrait même se fendre en deux.
S’il faut positiver ce qu’il nous est arrivé, disons que nous avons eu plus de peurs que de mal et que nous avons eu une belle leçon de prudence. Les bateaux étaient mouillés juste devant la patate, ce qui est normalement, assez inhabituel. Il fallait donc passer devant eux et non, derrière…
En voilier il faut TOUJOURS être hyper supra méga vigilent. Depuis, nous le sommes redevenus !! Pour ceux/celles qui ont une pensée pour le corail, sachez que nous étions autant désolés pour le bateau que pour celui-ci: nous n’aimons pas abimé ce qu’il reste de corail…
Une réponse à Le bateau c’est comme en voiture: on n’est jamais trop prudent!!!!